LE FILM DE NOTRE ENTREPRISE... PAGE EN COURS DE CONSTRUCTION

Cette page sensible est uniquement destinée aux collaborateurs du Crédit Lyonnais qui ont une vue différente de la vie dans l'entreprise souvent à l'opposé de celle de la Direction.

 

Ceci dit les collaborateurs qui avaient une vue divergeante n'étaient pas forcément hostiles au progrès de l'entreprise, mais avec une façon plus humaine.

 

 

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Deux articles.

L'incendie du Siège Central en 1996.

1974 : La gréve au Crédit Lyonnais

Mais auparavant quelques photos du splendide siège du Crédit Lyonnais

Photo P.Durand. Le siège Central 19 bld des Italiens Paris en 1994
Photo P.Durand. Le siège Central 19 bld des Italiens Paris en 1994
Escalier a double révolution au siège Central du Crédit Lyonnais
Escalier a double révolution au siège Central du Crédit Lyonnais
escalier suite
escalier suite
escalier suite
escalier suite
Photo De P. Durand Expo Photo en 1994 au Siège Central
Photo De P. Durand Expo Photo en 1994 au Siège Central
Photo prise par P. Durand exposition photo en 1994. Hall du siège central
Photo prise par P. Durand exposition photo en 1994. Hall du siège central
Photo prise par P.Durand exposition photo en 1994 Halle du Siège Central
Photo prise par P.Durand exposition photo en 1994 Halle du Siège Central
Photo de P.Durand Siège Central en 1994
Photo de P.Durand Siège Central en 1994

LE 6 MAI 1996......

Les années 80-90 ont été déterminantes dans la vie du Crédit Lyonnais.

 

Le président de l'époque a conduit un énorme paquebot sans gouvernail.

 

Nous savons tous comment l'aventure s'est terminée.

 

Mais une période précise nous a marquée;

Celle de l'incendie du Siège Central du Crédit Lyonnais le 6 mai 1996.

 

Arrêtons nous un instant sur cette tragédie.

 

 

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L'INCENDIE DU SIEGE CENTRAL DU CREDIT lYONNAIS

LE TEMOIGNAGE DE GILDA.

Dix-huit ans déjà que par un beau dimanche matin je reçus de Hong Kong un très étrange coup de fil d'un bon vieux copain de promo et qui disait : - "Dis Gilda, je crois que ton bureau est en train de cramer". J'ignore quelle heure il était chez lui, peut-être victime d'une insomnie, d'un petit coup de Heimweh, regardait-il les infos de Paris, "C'est sur France 2" m'avait-il dit.

 

Je ne savais pas, ça alors. Ben je vais aller voir, merci, ai-je répondu en substance peut-être assorti d'un Hé merde bien senti. Je me doutais qu'un incendie, aux salariés n'apporterait que des ennuis. J'ai raccroché, j'ai dit J'y vais. Je ne sais pas pourquoi comme ça j'avais filé, ça ne changeait rien. Je crois que je voulais voir l'ampleur du désastre, savoir que faire au lundi, si c'était seulement l'agence bancaire au rez-de-chaussé où les étages qui étaient touchés. Je n'ai appelé aucun collègue, je voulais voir d'abord.

 

Et quand j'ai vu sortir un gros panache noir des fenêtres précises où étaient nos locaux, c'est à mon amis Pierre que j'ai téléphoné. D'une cabine (1). Les pompiers ou plutôt la police avait bouclé le périmètre.

 

J'ai le souvenir d'une bonne dame équipée d'un cabas dont dépassait un poireau et qui tentait vainement d'obtenir l'accord pour retourner chez elle. Elle était sortie faire son marché et voilà qu'elle ne pouvait plus rentrer. Elle avait au moins de quoi manger.

 

L'incendie faisait rage, je me souviens de l'avoir très exactement pensé que j'avais sous les yeux l'illustration même de cette expression, qui se révélait (hélas) sans exagération. Je me suis revue le vendredi soir finir un peu plus tard pour achever une sauvegarde, étiqueter soigneusement la disquette, la ranger dans un boitier avec quelques autres déjà ordonnées, le boitier dans le placard derrière mon bureau, de ces placards professionnels hideux avec rideau coulissant gris, d'avoir fermé à clef, la clef dans le pot à crayons - pour le principe

 

-, revenir sur mes pas alors qu'au seuil de la porte, car les fenêtres, élevées (par elle on ne voyait pas elles étaient au dessus et je souffrais énormément de cette sensation d'enfermement) étaient restées ouvertes. La manivelle, les refermer.

 

Dès fois qu'il y ait un orage, sait-on jamais. De mon bureau lui-même il n'est rien resté : il s'est trouvé dans une partie du bâtiment qui s'était écroulée. Celui qui était à l'époque ma directe hiérarchie me confiait tous les documents importants :

J'étais du genre organisée (essentiellement pour ne pas perdre ensuite du temps), lui non. Au moins dans ton bureau, on sait où ils sont. On savait désormais qu'ils avaient entièrement brûlé. Alors que son propre bureau sis dans la partie que les pompiers s'étaient acharnés à préserver - zone des hautes hiérarchies, œuvres d'art aux murs, et sans doute dans les coffres des secrets bien gardés - n'avait que peu été touché. Et qu'il récupéra l'intégralité de ses dossiers. Sous une couche de cendre noire poisseuse, sans doute un peu toxique, mais néanmoins.

J'étais rentrée peu auparavant de congé de maternité et n'avais pas encore eu ni le goût ni le temps de personnaliser ma place. Hormis une calculette, et un vieux dictionnaire de l'informatique, déjà vieux en ce temps-là et que je gardais pour les définitions d'appareils déjà alors obsolètes dont la description m'amusait, je n'ai rien perdu de personnel dans l'aventure.

En revanche de précieuses archives professionnelles, dont des classeurs de dépannages informatiques où je m'étais constitué un stock très utile de "pannes vues", les symptômes et leur solution.

 

Comme une partie de notre travail consistait à aider des utilisateurs parfois lointains, cette documentation sur mesure était très utile. Elle me manqua longtemps. De même qu'au fil des ans et des demandes, des programmes, des fichiers, des documents qu'on prenait alors conscience d'avoir eux aussi perdus. La perte d'intérêt du poste que j'occupais date de ce moment-là : au lieu d'être sur de nouveaux projets nous avons passé notre temps à combler ce qui n'aurait pas dû cesser d'exister.

 

Quand ce fut éclusé nous avons dû nous gaver les modifs et tests de passage à l'an 2000 puis le passage à l'euro (et dans les fichiers et bases de données tout ce que ça impliquait). C'est à dire des surcharges de travail mais uniquement pour des choses mécaniques, qui n'en appelaient pas à de la réflexion satisfaisante ni à un savoir-faire exceptionnel. Finies les journées bouclées en se disant, Mazette, j'ai résolu ce point délicat, je ne m'en serai pas cru capable ; et d'avoir un emploi fastidieux mais comportant d'un point de vue neuronal de stimulantes satisfactions. Ingénieur, quoi.

 

Nous avons été du lundi - oh la rencontre fortuite d'un bon ami d'alors, perdu de vue depuis, j'ignore encore pourquoi : il a cessé de venir aux week-ends du ciné-club puis n'a plus répondu à rien et qui me croise sur le trottoir à la hauteur d'alors Del Duca, Que fais-tu là ? - C'est mon bureau, il a brûlé et je montre le bâtiment et lui qui passait en se hâtant lève les yeux et voit l'étendue du désastre - au mercredi en chômage technique, dès le jeudi dans des locaux à la Défense à rebrancher des ordis qui étaient des périmés d'autres services, de ceux qu'on garde dans une réverve pour pallier une panne d'un plus neuf. 

 

J'ai un plutôt bon souvenir de la période Remontons nos manches et les mains dans

le cambouis. J'aimais la bidouille, une liberté retrouvée. Loin du Siège Social nous subissions moins la pression hiérarchique, je me suis même autorisée à venir bosser en jean (ben oui quoi, on bricolait). Le jean étant pour moi le vêtement de travail parfait. Le bleu de travail.

Tout autre tenue me voit moins efficace, fors le maillot de bain pour nager et le short pour le foot. Je n'ai plus jamais retrouvé mon aptitude à ranger. L'appartement en témoigne. C'est l'année où les choses puisqu'elles n'étaient plus faites à mesure, ont commencé à déraper, les papiers à s'entasser, les vêtements et les chaussures à subir du retard dans leur indispensable tri Été / Hiver. (Les livres pour leur part avaient déjà tendance à proliférer, je ne crois pas que l'incendie ait modifié quoi que ce soit). Dès années après il m'est encore arrivé de remarquer une perte que le feu avait occasionné. Ainsi ce matin en lisant ce billet chez Baptiste Coulmont, un début d'étude marginale que j'avais faite sur les fréquences par années des prénoms et comment les modes descendaient les niveaux hiérarchiques car j'avais remarqué cette tendance via quelques données (dont un sous-fichier pour l'arbre de Noël en l'occurrence, pour lequel j'avais été en désespoir de cause chargée d'ôter les doublons et triplons à la main (1) d'où l'attention sur les prénoms ; la rubrique "naissances" du journal interne, également). Voilà, 18 ans après je prends conscience de sa disparition.

 

Mon petit chef, que ça amusait et qui trouvait qu'il s'agissait d'un excellent entraînement, m'avait à l'époque donné sa bénédiction à condition que ça soit fait sur les interstices quand les sujets officiels piétinaient. Il y avait aussi une magnifique étude sur les temps de transports en Île de France dans les années 70 et qui était passionnante pour qui savait décrypter.

 

Je l'avais un jour sauvée de la benne - les temps avaient changé, on ne se souciait plus du confort des salariés, au contraire, on avait bien envie de les décourager -. Je n'éprouvais pas d'attachement affectif envers mon travail, c'était un gagne-pain et vécu comme tel. Je m'efforçais d'être irréprochable, effectuais mon travail du mieux que je pouvais, mais mon âme ailleurs vivait. Il n'empêche que tout perdre, brutalement, par le feu est une expérience qui reste, laisse des traces, et nous change. Je me suis souvent demandé comment des collègues qui eux "s'investissaient" et aussi ceux qui personnalisaient beaucoup leur poste de travail s'en étaient au fond tirés. Peut-être mieux que moi qui me croyais détachée, mais suis sensible aux infimes infinis détails du quotidien. Il m'arrive encore de rêver du siège social tel qu'il était, en particulier le gymnase au sous-sol (que mes songes agrémentent volontiers d'une piscine), le jardin intérieur en soubassement (sans doute pour cela que celui de la BNF me "parle" autant), l'escalier en double révolution (revu depuis, il a survécu)

et puis "l'entrée en tombeau de Napoléon" côté arrière, voulue par l'un des présidents, des années de lourds travaux ... partis en fumée. (1) Il fallait veiller qu'un même enfant ne perçoive qu'un seul cadeau or certains pouvaient apparaître trois fois à la suite d'un divorce et d'un remariage au sein de l'entreprise, déclaré par la mère, le père, la nouvelle femme du père.

 

Le gros des troupes filtrables par programme, mais toujours de somptueux cas particuliers. Certaines personnes ayant visiblement des existences agitées mais que ça n'empêchait pas de vouloir profiter même indûment de tous les avantages. Cette double aptitude au rock'n'roll doublé d'une capacité à examiner le moindre document administratif m'a toujours sidérée. Alors que ça n'est pas strictement contradictoire, en fait. (1) Hé oui c'était au siècle dernier. D'un portable tout le monde n'était pas équipé.

Mais auparavant, souvenirs d'autres dégâts...

Les dégâts occasionnés par la guerre de 14/18 au Siège Central

Photo P Durand prise en 1990 côté gauche de la rue du 4 septembre
Photo P Durand prise en 1990 côté gauche de la rue du 4 septembre

Les dégâts occasionnés par la pseudo rénovation des années 70

Panneau reprenant les vues de la renovation des années 70 faite à coup de milliards de francs
Panneau reprenant les vues de la renovation des années 70 faite à coup de milliards de francs

Les dégâts occasionnés par l'incendie du 6 mai 1996

Le jour de l'incendie, je me trouvais à proximité, photographiant les grosses horloges du boulevard Sébastopol.

 

Je vis une fumée s'élever au fond de la Rue Réaumur mais j'étais loin de me figurer que c'était le siège du Crédit Lyonnais.

 

Je suis arrivé rapidement sur les lieux de la tragédie et je me suis rendu compte que c'était bien notre siège central qui brulait.

 

Je fus tétanisé et j'ai eu du mal à prendre des photos car cet incendie était violent, brutal.

 

Je connaissais ce siège depuis mon entrée au Crédit Lyonnais en 1967. Lors de mon embauche j'ai passé deux jours dans ce siège à visiter l'ensemble de ce bâtiment.

 

Après il y a eu les grèves de 1974 et j'ai fréquenté ce lieu pendant plus de deux mois parfois jour et nuit à l'annexe de la rue ménars, annexe occupée.

 

Et en fin de carrière en 2005, je suis retourné travailler dans ce lieu transformé depuis l'incendie et s'appelant "le centaurial", une vague réplique de la beauté de l'ancien siège.

 

Pierre Durand

 

 

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Le feu embrase l'ensemble du bâtiment
Le feu embrase l'ensemble du bâtiment
les dégâts sont énormes
les dégâts sont énormes
Le coeur n'y était plus à photogreaphier . P. Durand
Le coeur n'y était plus à photogreaphier . P. Durand
Le désastre photo de P.Durand
Le désastre photo de P.Durand

LE RENOUVEAU !!!

Le renouveau après quelques années de travaux
Le renouveau après quelques années de travaux
le renouveau suite
le renouveau suite

ET LES SOUVENIRS....

Début du vingtième siècle.
Début du vingtième siècle.

1974, LA GREVE AU CREDIT LYONNAIS

HISTOIRE ET TRIBUNE LIBRE

En cours de montage....Merci à toutes et à tous de donner vos témoignages.

LE PREMIER TEMOIGNAGE DE PIERRE..De son entrée au CL jusqu'à la grève de 1974.

DE 1967 A 1974

 

Auto interview de Pierre DURAND par PIERRE DURAND (On n’est jamais si bien servi que par soi-même)

PIERRE :

Bonjour Pierre, je voudrais savoir pourquoi est tu rentré au Crédit Lyonnais ?

Pierre :

Je suis sorti d’une école commerciale (niveau CAP) EN 1967 sans savoir ce que je ferais de mes dix doigts.

PIERRE :

Alors pourquoi le Crédit Lyonnais ?

Pierre :

Parce que des démarcheurs du CL sont venus nous voir à l'école en nous faisant miroiter un plan de carrière mirifique.

PIERRE :

Donc tu es rentré avec beaucoup de copains  j’imagine.

Pierre :

Oui, nous étions huit de la même classe. Il faut dire que le CL embauchait à tour de bras afin de pourvoir aux postes administratifs et aux travaux routiniers des grands centres mais aussi des comptabilités des agences.

PIERRE :

Le 16 aout 1967, tu es embauché et pendant deux jours tu vas être pris en charge pour voir ton lieu de travail, les avantages à travailler au CL, les futures promotions à espérer, la visite complète du siège Central (celui qui a brulé en 1996) bref la totale quoi !!!

Pierre :

Effectivement, j’en avais plein la tête et comme beaucoup de jeunes j’échafaudais le plan « permis de conduire, voiture, loisirs, vacances » enfin tout ce qu’on peut se payer quand on a de l’argent surtout lorsqu'on  sort d’un milieu modeste y compris pour mes collègues.

PIERRE :

Quel poste as tu obtenu et en quoi consistait le travail ?

Pierre :

J’étais aide-comptable en agence et il y avait pléthore de hiérarchie.

Par ordre :

Les garçons de services, puis les aides-comptables, les aides-sous chef comptables, les sous chefs comptables et le chef comptable, bref on se croyait dans une armée méxicaine !!!

PIERRE :

Et le travail ?

Pierre :

Beaucoup de listing à pointer, quelques liasses de  virements à  dactilographier, de la mécanographie pour mettre à jour les comptes des clients, puis du classement, voilà en gros les tâches à faire chaque jour.

 Il y avait aussi un langage particulier par exemple le crocodile était une pièce métalique qui servait à insérer les pièces de comptable et à les classer par postes, la "carotte"  était une enveloppe rose et la "négresse" était une sacoche noire destiné aux aller et retour avec le siège. D'où les plaisanteries de mauvais goûts par des vieux employés; As tu mis la carotte dans la négresse ? Un niveau bien bas au ras des paquerettes !!!

PIERRE :

Beaucoup de tâches répétitives en somme.

Pierre :

Oui et après trois années passées à la comptabilité, la promotion a été un poste de guichetier d’accueil avec des chefs un peu borné qui s'enguelaient devant les clients. Les agences étaient classées par lettre alphabétique et la grande insulte  des chefs quand on faisait une erreur était de dire que tu devrais aller travailler à l'agence Q et ce devant les clients, (L'agence n'existait pas à cause de sa double interprétation.)

PIERRE.

Et mai 68, que s’est il passé à l’agence ? 

Pierre :

Il n'y a eu que peu de réaction. Je n’étais pas titulaire mais j’ai un copain qui a fait grève n'étant pas titulaire et il a eu de gros problèmes

 

PIERRE :

Le personnel gréviste n’était pas apprécié de la hiérarchie ?

Pierre :

Tout à fait et certains ont connu « les postes placards » y compris pour les cadres grévistes.

PIERRE :

L’ambiance en agences ?

Pierre

Par contre c’était très cordiale. On sortait souvent ensemble le soir et nous allions au restaurant, voire dans des boites. Nous étions solidaires les uns et des autres et par la suite cela a été très utile.

PIERRE :

Politiquement, vous aviez des idées.

Pierre :

Aucunement, la prise de conscience politique est venue lorsque j’ai adhéré en 1970 à la CFDT.

PIERRE :

Comment avez-vous été accueilli au sein du syndicat ?

Pierre ;

Au début très bien, nous étions une bonne bande de copains. Et puis après il y a eu des intérêts personnels qui se sont dégagés.

PIERRE :

Pourquoi ?

Pierre ;

En fait dans le syndicat il y a des postes de permanents à prendre et si vous êtes un bon militant revendicatif vous pouvez monter dans la hiérarchie, le jeu consistant à vous faire remarquer par vos supérieurs syndicaux.

PIERRE :

Un peu comme au bureau en fait ?

Pierre :

Absolument, et ainsi vous  êtes à l’abri du monde du travail et surtout de la production.

PIERRE ;

Vous êtes jeune, peu politisé, pourquoi avoir continué dans la voie du syndicalisme ?

Pierre :

C’est idiot mais c’est grâce à mon nouveau patron nommé au sein du groupe d’agence où je travaillais. C’était un type un peu déséquilibré. Par exemple il m’a appelé dans son bureau pour me dire qu’il n'aimait pas les jeunes et  les cheveux longs. Je lui ai répondu du tac au tac que pour les cheveux, je pouvais aller chez le coiffeur mais pour ma jeunesse je ne pouvais rien faire, il fallait attendre. 

Autre exemple un nouveau démarcheur est resté deux heures dans notre agence à cause d'un angiome (tâches de vin) sur le visage. Le directeur s'est exclamé que que l'on ne pouvait pas garder un type avec un visage aussi laid !!!

 

Lorsque j’ai été élu délégué du personnel, il m’a fait mettren en quarantaine par les cadres de l’agence . Cela a produit un effet boomerang.

Résultat sur une agence de trente cinq personnes : vingt cinq adhésions à la CFDT dont trois délégués et la sympathie de certains cadres de l’agence.

Un point de détail : Lorsqu’il pleuvait, ce patron courait après les clients qui rentraient dans l’agence et les obligeaient à mettre leur parapluie dans une corbeille prévue à cet effet !!! Bref un fou qui a fini par se faire allumer par sa direction mais malheureusement en fin de carrière.

PIERRE :

Il y avait un malaise au travail en agence ?

Pierre :

Oui et c’était dans toutes les agences à la veille de 1974. Lorsque nous allions en réunion de délégué du personnel, nous prévenions nos interlocuteurs de ce mal être et nous avions pour toute réponse des espèces de railleries.

PIERRE :

Et voilà que nous arrivons en janvier 1974 et comme aurait dit la célèbre chroniqueuse de RTL, « Geneviève Tabouis » ; Mais attendez vous à savoir….que les employés de banque se mettent en grêve…

Les services centraux commençaient à débrayer. En début février 1974, alors que je faisais une visite syndicale d’agences aux Champs Elysées, le personnel a posé ses stylos, s’est levé (y compris certains cadres) et m’a dit qu’ils ne pouvaient plus continuer à travailler dans des conditions épouvantables avec des patrons souverains. Donc me voilà dans le métro avec derrière moi une cinquantaine de personnes en direction de la permanence qui se situait à côté du siège, rue Ménars. Dans le même temps une autre délégué qui avait fait une visite d’agences dans la grande agence du siège central avait eu le même résultat. Le lendemain ce sont toutes les agences parisiennes qui se sont mises en grêves.

La grêve à la fois prévisible pour nous syndicalistes et imprévisibles pour les patrons allait durer pendant plus de deux mois.

PIERRE :

Aviez vous une formation pour gérer ce mouvement ?

Pierre :

Aucune et c’est là le problème de la CFDT de l’époque.  Le personnel a été inventif et a créé des comités de grève. Certains de ces comités ont été manipulés par des mouvements politiques d’extrème gauche ou voire de gauche, La hiérarchie syndicale était très bureaucratique  et ronronnait dans leur bureau bien aménagé par le direction.Mais du fait de la grève prenant une ampleur soudaine Ils ont été  obligés de se bouger et parfois dans le sens opposé des intérêts des travailleurs.

Personnellement j'avais des copains de tous bords mais j'en avais plus à l'extrème gauche sans pour autant adhérer à leur thése politique.

En tant que délégué je n'étais pas à l'aise car autant j'ai été revendicatif au sein des agences de mon groupe, autant timidité oblige, j'étais bloqué pour prendre la parole en assemblée générale. Je vivais cela comme un échec.

PIERRE :

Donc vous ne saviez plus  à quel saint vous vouez.

Pierre :

Exactement, nous avions cinq syndicats qui allaient « officiellement dans le même sens » mais certains dérapaient et souhaitaient faire reprendre le travail rapidement.

PIERRE :

ET Arlette Laguiller, as t’elle été la grande militante dépeinte à l’époque ?

Pierre :

Elle a contribué par son charisme à créer une dynamique de révolte. Mais au delà il y avait son enjeu politique ; être présente aux élections présidentielles de 1974 ;

PIERRE :

Pourquoi les patrons ont-ils cédés ?

Pierre :

Il y a eu la mort du président Georges Pompidou le 2 avril 1974 et à ce moment les patrons bancaires ont lâché du lest.

PIERRE :

Avez-vous obtenu satisfaction à vos revendications ?

Pierre :

Oui nous avons obtenu  gains de cause aux revendications et même nos journées de grèves ont été presque toutes payées.

PIERRE :

Alors heureux ?

Pierre :

Oui et non car au bout de cette lutte nous étions cassés et personnellement j’ai eu du mal à m’en remettre. J’ai eu une sorte de fatigue incontrôlée et j’avais du mal à retourner au travail. Certains collègues ont eu d’autres problèmes dans leur vie familiale. Bref nous avons payé cher cette lutte même si nous avons obtenu  des acquis.

PIERRE ;

Merci Pierre pour ce témoignage et si quarante ans après vous remettiez ça ?

Pierre : 

 Je n’ai plus  envie et  je suis maintenant à la retraite !!!

 

De plus j'ai quitté la CFDT en 1984 pour divergences de vues et depuis je suis plus tendance CGT qui est devenu maintenant un syndicat plus proche des travailleurs.

L'inverse de 1974 quoi ....

 

Bien entendu ces propos n'engagent que moi.

 

PIERRE DURAND

 

 

 

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Un militant Bernard Harquet devant une annexe du siège central  du Crédit Lyonnais occupée

Un lien vous permettant de visualiser la bande annonce du documentaire "l'autre façon d'être une banque".

L’autre façon d’être une banque (Le cinéma de Mai 68 ...
www.editionsmontparnasse.fr/video/4859TJ
Editions Montparnasse est membre de l’Union de l’Edition numérique et Vidéographique Indépen

LA MANIFESTATION DE GREVE CREDIT LYONNAIS SOUS UNE PLUIE BATTANTE AVEC DES BATTANTS !!!!
LA MANIFESTATION DE GREVE CREDIT LYONNAIS SOUS UNE PLUIE BATTANTE AVEC DES BATTANTS !!!!

UN AUTRE DOCUMENTAIRE DE FRANCE CULTURE

 
A ECOUTER L EMISSION SUR FRANCE CULTURE '(aller sur le site de France Culture)
 
 
e l'Histoire│11-12 par Emmanuel Laurentin du lundi au vendredi de 9h06 à 10h 

Banques et banquiers 2/4

« Le Mai des banques », un documentaire de Séverine Liatard et Séverine Cassar. Au début des années 1970, la banque vit sa ...

 

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13.03.2012 - 09:05 Ajouter à ma liste de lecture

 

 

« Le Mai des banques », un documentaire de Séverine Liatard et Séverine Cassar

Au début des années 1970, la banque vit sa troisième révolution et se trouve en pleine expansion. Dans ces établissements semi-publics ou privés, le nouveau personnel est jeune et recruté à un niveau d’étude relativement bas. La profession bancaire est également très féminisée et peu rémunérée avec des perspectives d’évolution moindre.

C’est dans ce contexte que  le conflit démarre à la Banque de France au début de l’année 1974. Après plusieurs journées d’action nationales lancées par la CFDT et la CGT, les salariés des autres banques entrent dans le mouvement et les autres syndicats – FO, la CFTC et le syndicat des cadres, la SNCB – rejoignent et appelle à la grève reconductible.

A Paris, puis en province, la pratique d’assemblées générales tenues dans chaque banque ou à la Bourse du travail est la règle. Les comités de grève élus s’opposent parfois à l’intervention des syndicats. Ces derniers ne sont pas toujours en accord concernant  la stratégie à adopter face à l’attitude de certains groupes d’extrême gauche partisans d’une grève dure avec occupation des banques et leur fermeture. C’est d’ailleurs au Crédit Lyonnais qu’Arlette Laguiller participe à cette grève en tant que militante FO et porte-parole de Lutte ouvrière. Pour sa part, la CFDT a tendance à soutenir la conception  démocratique de cette lutte.

Les revendications sont classiques (hausse de salaires, condition de  travail, 35h, égalité hommes/femmes, progression de carrière, sécurité dans les agences …) mais le gouvernement ne veut pas céder sur les salaires craignant une contagion à d’autres secteurs. Le patronat soutenu par Giscard, ministre des Finances, va cependant céder peu à peu. Le 2 avril le décès du président Pompidou vient modifier les données du problème. Giscard, candidat à la future présidentielle, reçoit les organisations syndicales à  la fin du mois de mars 1974 pour trouver une issue. Le conflit décline mais va perdurer encore quelques semaines. Il aura duré plus de neuf semaines.

Avec les témoignages de : Liliane Dutheil, Joseph Dounovetz, Daniel Lemire, Ohan Toufanian, Georges Bégot, Martine Leblanc, Luc Derieu et Jean Lévy